Cezanne. Sa bastide atelier…

La bastide du Jas de Bouffan, située à la lisière ouest de la ville d’Aix-en-Provence est un lieu fondamental dans l’histoire de Paul Cezanne. Cette bastide a été achetée par son père, Louis-Auguste Cezanne, en 1859 et sera vendue en 1899, soit 13 ans après la mort du père de l’artiste.


C’est donc à 20 ans que Paul Cezanne (1839 - 1906), qui connaît déjà bien cette partie là de la campagne aixoise, va en faire le centre de gravité de son art qui deviendra au fil du temps cette « Provence de Cezanne » aujourd’hui connue mondialement. La bastide du Jas de Bouffan, autrefois entourée de 15 ha de vignes et de vergers, est devenue pour le « Père de l’Art Moderne » une source d’inspiration importante par ses paysages, ses points de vue et la beauté de son parc... Il s’agit d’un atelier en plein air pendant près de 40 ans, autant qu’un lieu de résidence et de création.

Dès 1881, le père de Cezanne a fait construire pour son fils un atelier sous les toits où il réalisera nombre de ses toiles, aujourd’hui visibles dans les plus grands musées du monde, et que va rassembler le musée Granet d’Aix-en-Provence à l’été 2025. Dès 1859, le père de Cezanne achète la bastide et laisse à son fils la jouissance du lieu. C’est dans ce « Grand Salon » que ce dernier va rapidement prendre possession des murs et réaliser de nombreuses peintures.

Entre 1859 et 1869, Cezanne orne ainsi le « Grand Salon » de 9 peintures aux thèmes variés. On les croyait toutes inventoriées, même si au fil du temps celles-ci ont été déposées (c’est à dire enlevées des murs) du « Grand Salon », quand les Cezanne revendent en 1899 la bastide et les terres environnantes à la famille Granel-Corsy.

Pourtant, à la faveur de la restauration de la bastide et de nouveaux sondages effectués dans les murs du « Grand Salon », les certitudes que les spécialistes pouvaient avoir acquises volent en éclat : une nouvelle œuvre a été découverte en août 2023. Il s’agit non seulement des traces de peinture d’un premier panneau, mais aussi d’un ensemble de 5 à 6 m² correspondant à un tout premier panneau que l’artiste peignit au Jas de Bouffan.

Ces fragments ont été authentifiés formellement. Ils semblent remettre en cause l’ordre chronologique de création de tous les panneaux connus qui figuraient sur les murs du « Grand Salon ». Cette œuvre mise au jour représente très probablement l’entrée d’un port. On reconnaît des oriflammes, des mâts de bateaux, on voit un ciel réparti sur toute la largeur du mur. Pour les spécialistes, cette découverte est d’importance car elle est le dernier témoignage in situ du travail de l’artiste dans sa bastide. Elle permet de percevoir et comprendre la révolution picturale que l’artiste opère, passant d’œuvres considérées comme décoratives à des œuvres affirmant sa personnalité d’artiste hors norme et père de l’Art Moderne. CQFD !


- Atelier de Cezanne © Sophie Spiteri -