Un Bourgogne, sinon rien…

Depuis 2012, à la demande de ses élus, le Bureau Interprofessionnel des Vins de Bourgogne (BIVB), ne traduit plus jamais le nom « Bourgogne », quel que soit le pays. L’objectif : aider les consommateurs à s’y retrouver, en mettant enfin en cohérence les étiquettes et le nom du vignoble où ils sont nés. Il est aujourd’hui une mosaïque d’un peu plus de 30 000 ha, qui couvre à peine 0,5 % de la production de vin mondiale, avec quasiment 200 millions de bouteilles.




Les vins de Bourgogne jouissent d’une belle renommée à travers le monde : une bouteille de vin de Bourgogne sur deux est vendue à l’export dans près de 170 pays. Toutefois, plus le consommateur vit loin de France, plus il peine à comprendre le système d’appellations français. Il se repère grâce à l’origine, le nom du vignoble. Il peut alors paraître cohérent d’afficher un seul nom, synonyme d’excellence et de respect des origines : Bourgogne. Historiquement, la Bourgogne est le seul vignoble français dont le nom est traduit dans diverses langues : « Burgundy » chez les anglophones, « Burgund » chez les germanophones, « Borgogna » en Italie... Un héritage très ancien, dont l’origine est à puiser dès la construction de la région, qui est depuis toujours un carrefour d’échanges entre l’Europe du Nord et du Sud, de l’Est et de l’Ouest. 

Ainsi, les producteurs et amateurs de vins de Bourgogne vivent dans un paradoxe. Les 200 millions de bouteilles de vins de Bourgogne commercialisées chaque année portent le nom « Bourgogne » sur leur étiquette : via leur appellation (Bourgogne, Crémant de Bourgogne, Bourgogne Aligoté…) ou la mention « Vin de Bourgogne / Grand vin de Bourgogne ». Pourtant, c’est bien dans un rayon intitulé Burgundy, Burgund, Borgogna… que les consommateurs vont acheter ces vins. De quoi les rendre schizophrènes ! 

« Il nous est apparu nécessaire de revenir à notre nom d’origine, Bourgogne, afin d’affirmer notre vraie identité, de manière unie et collective » explique François Labet, Président du BIVB. « Je dirais que, si nos appellations sont nos prénoms, alors Bourgogne est notre nom de famille. Celui qui nous réunit tous, avec nos valeurs communes et toute la diversité de nos vins. On ne traduit pas un nom de famille ! ».

Petit à petit, les choses évoluent et l’on commence à voir apparaître, dans les médias ou sur certains sites partenaires à l’étranger, le mot Bourgogne, en français dans le texte. Cette position est assez bien comprise, même si les habitudes mettent du temps à évoluer. « Alors que Burgundy est le nom le plus connu pour ce vignoble français dans les pays anglophones, je garde à l’esprit que tous les autres vignobles français conservent leur nom d’origine, où qu’ils soient référencés dans le monde. Aussi, je comprends parfaitement pourquoi la Bourgogne ne veut plus être une exception et choisit de mettre fin à l’usage de son nom en anglais. » explique Patrick Schmitt (Rédacteur en chef, The Drinks Business). 

Également interrogé, Julien Camus, Président de la Wine Scholar Guild déclare : « Les terroirs, dont nous œuvrons à promouvoir et expliquer les identités à travers le monde, sont non seulement ancrés dans un lieu géographique, mais aussi dans une réalité culturelle et historique dont la langue est une composante majeure. Traduire le nom d’une région, c’est déjà lui retirer un peu de son identité. C’est pourquoi il nous tient à cœur de toujours nommer les régions viticoles dans la langue de leurs habitants. Elles en gardent l’accent qui les rend uniques. »