La Mère la Vertu…

retour de la pudeur ?

Du bikini (1946) au burkini (2004) en passant par l'apparition du monokini en 1964, la disposition des femmes à dévoiler leur corps en été a évolué de façon drastique.


- photo Jiri Ruzek -


Alors que les polémiques sur le sujet resurgissent régulièrement (le burkini en France en 2016, bikini en Algérie en 2017), l'Ifop publie une enquête permettant de faire le point sur l'évolution des comportements des Françaises en matière de nudité sur les plages en été tout en les comparant aux pratiques observées dans les principaux pays d'Europe et d'Amérique du Nord.


Pour François Kraus, directeur du pôle politique de l’Ifop : «  la lecture des résultats de cette enquête, c'est autant le regard des autres que le regard que les femmes portent sur elles-mêmes qui poussent les Françaises à moins se dévoiler aujourd'hui qu'hier.

Dans un contexte plus que jamais marqué par le culte de l'apparence et le déferlement d'images de corps parfaits, la crainte de ne pas répondre aux canons de beauté en vogue constitue sans doute un frein important pour toutes celles qui ont intériorisé l'idée qu'il fallait un corps « irréprochable » pour se permettre de le montrer en public.

Mais si le « terrorisme de l'esthétique et de la beauté » joue beaucoup dans la moindre exposition des corps des femmes en été, le reflux du culte du bronzage auquel une pratique comme le « topless » a toujours été associée n'y est aussi sans doute pas étranger. En effet, par rapport à des années 80 où le teint hâlé et le bronzage monoï étaient à l'honneur, le souci de se protéger du soleil ne favorise pas le dévoilement des corps.

Enfin, on ne peut nier que le dévoilement féminin n'a plus la même portée symbolique qu'il pouvait avoir dans les années 60/70, époque où sans forcément avoir une tonalité politique directe, il apparaissait pour certaines comme un moyen de rappeler aux hommes que leur corps et leur sexualité leur appartenaient. Or, comme l'explique bien la sociologue Janine Mossuz-Lavau, à une époque où « la plupart des jeunes femmes, à tort ou à raison, s'estiment libérées sexuellement », certaines ne ressentent plus forcément le « besoin d'afficher ce signe ostensible qui en était justement la marque ».

En perdant une partie de leur caractère subversif tout en s'attirant des discours de mise en garde d'ordre médical, les dépoitraillements publics sur les plages en été apparaissent donc de moins en moins comme un symbole d'émancipation féminine et de plus en plus comme une technique de bronzage « à risque ». CQFD !



- photo Giorgio Montersino -