Alpes-Maritimes : les... désaccords d’Evian,

à propos du 19 mars.

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Après l’abandon de l’Algérie par la France, le département à l’extrême sud-est de l’hexagone a vu dans les années 60 arriver de nombreux pieds-noirs et quelques harkis. Ils ont été plus ou moins bien accueillis (très mal à Marseille par Gaston Deferre) mais se sont fait une place à force de travail car beaucoup ont débarqué avec pour tout bagage, une valise et des souvenirs. Souvenirs de moments heureux jusqu’au final tragique que l’on connaît, validé par le général De Gaulle. Pour eux, leurs enfants et leurs petits enfants, le souvenir des Accords d’Evian est très douloureux. On comprend qu’avoir choisi de commémorer la fin de la guerre d’Algérie le jour de la signature de l’armistice, est une maladresse pour ne pas dire plus. On comprend aussi qu’ils puissent se sentir blessés.

Dans les Alpes-Maritimes, plusieurs élus ont décidé de ne pas s’associer aux cérémonies organisées par les services de l’État. Le député Lionnel Luca fut un des premiers à stigmatiser l’initiative du gouvernement mis en place par François Hollande mettant en évidence le fait que « pour la première fois de son histoire, la France commémore un cessez-le-feu le jour de la victoire de ses adversaires ».

Pour Christian Estrosi, député-maire de Nice, « c’est un déni de vérité ». De son côté, Éric Ciotti, député et président du Conseil général annonçait qu’il n’enverra aucun représentant et parle « d’une faute morale et une insulte faite à la mémoire de toutes celles et de tous ceux qui ont disparu et trouvé la mort dans les mois qui suivirent la signature des accords d’Evian. »

Sur le même sujet sensible, la député-maire de la commune du Cannet, Michèle Tabarot, s’exprimait hier dans un communiqué de presse :

« Fin octobre 2012, en recourant à une manœuvre inacceptable qui a empêché l’Assemblée nationale de se prononcer, le Sénat a adopté une loi pour faire du 19 mars la journée du souvenir des victimes de la guerre d'Algérie et des combats en Tunisie et au Maroc.

Cette décision de célébrer les accords d’Evian a été douloureusement vécue par les rapatriés et les harkis qui eux savent mieux que quiconque que cette date n’a jamais signifié la fin des combats et de la souffrance. En effet, choisir le 19 mars 1962, c’est oublier la souffrance des familles de ceux qui ont perdu la vie après ce cessez-le-feu et notamment les victimes des massacres du 26 mars, rue d’Isly, et du 5 juillet à Oran.

 Plus de 60 ans après, il est absurde de rouvrir ainsi cette blessure alors que le Président Chirac avait su apaiser les esprits en faisant du 5 décembre la date officielle des commémorations, choix qui recueillait un très large consensus. Malheureusement, la majorité au pouvoir a préféré écouter quelques associations politisées qui se plaisent à entretenir des tensions inutiles au mépris de l’objectif d’apaisement qui devrait pourtant primer... »

Ainsi, Michèle Tabarot n’organisera ni ne s’associera à aucune cérémonie de commémoration du 19 mars. Les drapeaux de la commune du Cannet seront mis en berne par respect pour les rapatriés, les harkis et les anciens combattants...

NDLR : Jean Leonetti, maire d'Antibes, René Vestri, maire de Saint-Jean Cap Ferrat (aujourd'hui disparu), Jean-Claude Guibal, maire de Menton et Bernard Brochand s'étaient émus avec d'autres représentants de la nation de cette initiative gouvernementale en novembre 2012. Mais on peut s’étonner du silence d’autres élus sur ce sujet éminemment politique. N’ont-ils pas d’opinions sur le sujet ? Redouteraient-ils une sanction de la part des autorités ? Où seront-ils aujourd’hui, qui délégueront-ils ou pas lors de ces cérémonies officielles ? Dans certaines circonstances, ne rien dire, c'est être complice !