Nice : visite... sans réserve dans un haut lieu de la gastronomie

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qui voit se confirmer les talents d'un cuisinier venu de Finlande, Jouni Törmänen.

En 1876, l’immeuble avait belle allure. Telle une sentinelle veillant sur l’entrée du Port de Nice, ancré sur un piton rocheux, c’était un luxueux hôtel-restaurant. Racheté en 1945 par des industriels, rénové, rebaptisé « Roc-Beach », les prestations y étaient uniques : piscine à l’air libre, solarium, plongeoir et chutes d’eau, avec toujours son fameux vivier de poissons frais. On prévoyait même d’y adjoindre des cabines de bain, une terrasse-piste en plein ainsi qu’un casino. Mais entre les prévisions et la réalisation, il y a parfois un abîme.

Transformé en copropriété, il a fait durant 50 ans, le bonheur de quelques privilégiés qui y vivaient, certains d’ailleurs y habitent encore.

Quand en 2006, Jouni Törmänen obtient sa 1ère étoile Michelin dans son minuscule « Atelier » de la rue Lascaris, il envisage de trouver un cadre correspondant à sa cuisine. Giuseppe, débonnaire géant italien et Jouni, jeune elfe surdoué qui n’a ramené de sa Finlande natale qu’un talent exceptionnel (il est sûrement le plus méditerranéen de tous les Scandinaves), associés depuis le début de l’aventure gastronomique, trouvent enfin leur éden : une partie de La Réserve est à vendre et ils peuvent y réinstaller un restaurant. L’affaire est conclue l’an passé : façon Art Déco, tout ici respire l’élégance décontractée des grands liners des années 30 : miroirs, boiseries, terrasses solarium, bar. Sur chacun de ses deux ponts, Jouni orchestre avec talent ses équipes managées par le fidèle Giuseppe.

Au rez-de-chaussée, « Le Bistrot de La Réserve » perpétue l’esprit initial de son ancien « Atelier » , avec des recettes simples et goûteuses à prix doux, tandis qu’à l’étage, Jouni affiche, grâce à son étoile Michelin retrouvée, son ambition gastronomique pour une trentaine de couverts.

Durant les mois d’hiver, les 2 établissements sont regroupés au rez-de-chaussée, avec à midi, l’accent mis sur le « Bistrot », et le soir, couverts en argent oblige, on est dans un « gastro » à prix doux : menu du jour (amuse bouche, plat du jour, dessert du jour + café) à 30 €, menu de « La Réserve » (entrée, plat, dessert ou fromage) à 65 €. Le soir, Jouni et son jeune second Sébastien Mahuet propose le menu de « L’Atelier » en plus, (2 entrées, plat, 2 desserts ou fromage et dessert) pour 100 €. Uniquement sur réservation et pour l’ensemble des convives, on peut s’envoler vers une déclinaison somptueuse « Les Huit Surprises du Chef » pour 150 €.

Vous avez bien lu, dans ce petit bijou étoilé, midi et soir, on peut aussi manger pour 30 €. C’est en hommage aux 100 ans du Guide Michelin que Giuseppe et Jouni ont créé cette formule qui, crise oblige, risque de perdurer un certain temps.

La cuisine de Jouni ? Une explosion de bonheur visuel dans l’assiette, gustatif pour les papilles. Imprégné de cuisine du Sud, et même du Grand Sud (Pastille de Pigeon aux parfums marocains dans le menu à 65 €), ce jeune prodige (37 ans), digne émule d’Alain Ducasse, travaille ses produits, bio de préférence, sans fioriture. Il faut goûter dans le menu de La Réserve son poulpe fondant aux légumes de saison, coloré avec ses chips de pommes de vitelotte, ses brins d’aneth, ses arômes subtiles soutenus par un simple filet d’huile d’olive vierge, pour les plats, la décision entre la bourride de la Réserve, panaché de poissons, coquillages et crustacés dans une fine sauce aux herbes, un pur délice, et les calamars à la plancha, les crudités râpées du marche et les gambas rôties : on est dans la vraie gastronomie, subtile, raffinée, où les saveurs des produits sont particulièrement respectées.


- vu du pont…

  • La Réserve – 66 Boulevard Franck Pilatte – 06300 – Nice – Tel : 04.97.08.14.80 - Ouvert 7 jours sur 7, midi et soir.