Les dépassements d'honoraires : la médecine malade.

Plus graves, les règlements en espèces…

Catégorie C'est notre santé

- un dépassement d'honoraires vital ?

L'Inspection générale des affaires sociales vient de mettre les pieds dans le plat en dénonçant la pratique "abusive" des dépassements d'honoraires. Qui n'en a pas fait l'expérience, qui n'a pas eu un proche obligé de prévoir pour le chirurgien, l'anesthésiste, la sage-femme, une enveloppe, à part ? Dans le langage populaire, cela s'apparente, si je ne m'abuse, à des dessous de table, coutume dont la profession médicale n'a pas l'exclusive …

Paris et la Côte d'Azur sont assurément les régions dans lesquelles ces pratiques sont les plus répandues. Il y a les tarifs de base de la sécurité sociale qui déterminent les taux de remboursements de l'assurance maladie et des complémentaires et puis, il y a ce qui est devenu trop souvent un usage : les dépassements "abusifs" d'honoraires sans qu'il soit facile de déterminer où se situent les limites du terme abusif…

Alors comment en est-on arrivé là ? Pourquoi avons-nous, les uns et les autres - l'état donnant le mauvais exemple - accepté ces pratiques souvent abusives, parfois condamnables ? Sans doute parce que, dans notre société, le médecin jouit d'un statut spécial. Il s'est installé sur une haute marche et impose ses diktats. Le fait de soigner, d'avoir une action si décisive sur la vie et la mort des gens, le place au-dessus du panier, au-dessus des "gens"… Et lui, bien conscient de ce pouvoir, trouve normal au fond de prendre quelques libertés, libertés que la société tolère alors qu'elle ne le ferait pas pour d'autres catégories de citoyens.

Même si le médecin de famille tant à disparaître, même s'ils sont de moins en moins nombreux à faire des visites à domicile, nous connaissons tous des médecins qui se contentent des tarifs de base de la Sécu et qui font preuve d'un dévouement exemplaire… pour un revenu relativement modeste. Nous savons aussi qu'il existe des médecins qui galérent, qui sont corvéables à merci dans des régions de France où les professionnels de la santé sont rares. Mais ceci n'excuse pas cela. Le fait aussi de dire que les études médicales sont longues et difficiles (ne l'oublions pas largement financées avec des deniers publics) ne doit pas dédouaner pour autant le corps médical de ses responsabilités et de ses obligations… même celles d'ordre moral…

Ils sont - c'est l'Inspection générale des affaires sociales qui nous le dit – nombreux aussi les membres de ce corps éminent qui tirent sur la ficelle et poussent, semble-t-il - un peu loin le bouchon. Nous n'évoquerons pas ici ceux qui vont jusqu'à tricher sur leurs prestations, facturant des services et des présences qu'ils n'effectuent pas. Plusieurs d'entre eux ont été, dans le Sud de la France, inquiétés par la Justice, peu condamnés au final… Evoquons seulement les deux présumés milliards d'euros comptabilisés par l'IGAS. Ils seraient passés des poches des malades dans celles des guérisseurs… sans forcément passer par la case trésor public…

Les médecins sont-ils si mal payé que ça dans notre pays ? Ont-ils besoin de tels dépassements d'honoraires pour assurer leur confort ? Pourquoi certains ont-ils pris la détestable habitude, depuis plusieurs dizaines d'années, de demander, préalablement à leurs interventions, des enveloppes contenant des espèces et ne donnant pas lieu ni au moindre reçu, ni à la moindre déclaration fiscale ?

Quant à l'usage, tout aussi détestable, de faire prendre des rendez-vous par son secrétariat toutes les 15 minutes alors qu'on sait qu'au moins 30 minutes sont nécessaires (alors que l'on sait aussi qu'il faudra tenir compte des urgences…), il est significatif d'un manque de savoir-vivre et de respect plus ou moins conscient pour le malade. Le médecin accepte pour soi ce qu'il ne tolèrerait pas chez les autres. Il sera le premier à râler s'il doit faire la queue à une caisse, à la poste, si un rendez-vous pris donne lieu à un retard, pour lui ou pour un membre de sa famille.

La pratique des dépassements d'honoraires a tendance à se généraliser. Quelles qu'en soit les causes, elle ne pourra conduire qu'à une médecine à deux vitesses et aura pour conséquence d'accentuer ce qui déjà trop souvent le cas : les classes aisées sont mieux soigner que les autres.

Le représentant d'un syndical de médecin contestait hier les chiffres et déclarait que l'IGAS avait raté là une occasion de se taire… Est-ce là un nouveau symptôme, celui de la politique de l'autruche ? Assurément, c'est le signe d'un dysfonctionnement organique de notre société !

- mention : www.pariscotedazur.fr - avril 2007 -
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