On s’habitue, c’est tout !

Jacques Brel dans sa chanson "On n'oublie rien de rien", nous le serinait déjà.

Catégorie Les paradoxales

C’est notre plus grande force et notre plus grande faiblesse…notre faculté d’adaptation. Il est presque aussi facile de s’accoutumer au pire qu’au meilleur, bien que les conséquences quant à notre confort ne soient pas les mêmes, reconnaissons-le. On s’habitue vite à vivre dans la prospérité, à bien manger et à bien boire.

On s’habitue aussi à vivre de moins en moins bien ,surtout si le phénomène est progressif et donc peu perceptible. Il nous faut quelques mois pour constater que le temps passé dans les embouteillages augmente, que l’air est plus pollué, qu’il est plus difficile de trouver une place de stationnement…Mais notre révolte, quand révolte il y a, est bien superficielle et s’exerce généralement contre d’autres victimes. Klaxons d’impatience, insultes diverses … en sont les signes extérieurs. Les coupables sont vite trouvés : l’administration, les politiques … sans que cela serve à grand chose car les autorités sont impuissantes à contrôler l'évolution de notre société. Les progrès technologiques, la prospérité économique créent de nouveaux besoins qui ont des effets pervers qu'on ne prévoyait pas et qu'on ne maîtrise pas.

Autre effet indésirable, conséquence d'un monde qui change et de nos choix, le développement de l'incivilité, de la délinquance sous toutes ses formes et de la violence. L’insécurité, maître mot d’un vaste programme que nos élus, qu'ils soient dans la majorité ou pas, exploitent à tour de bras et de déclarations d’intention.

Et chacun y va de son petit bilan. Les uns constatent une hausse de la délinquance, les autres se vantent d’un bilan local qui leur permet d’afficher une baisse des délits en tout genre. Comment s’y retrouver dans cet amalgame de chiffres ? On a bien du mal à faire la différence entre les vols de portable et les cambriolages avec violence. Les petits délits, scènes de la vie ordinaire, simplement consignés sur les mains courantes des gendarmeries et des commissariats de police de tout l’hexagone, sont trop nombreux pour être comptabilisés et trop insignifiants pour qu’on s’y intéresse, sauf pour ceux qui en sont les victimes. Souvent, ils ne prennent même pas la peine de signaler leurs infortunes, découragés à l'avance par ce qui les attend…

Au-delà des statistiques, qui ne sont que des indications, c’est le climat général qu’il faut prendre en considération. Il s’appuie sur des informations de proximité. J’ai personnellement assisté à un vol à l’arraché, en plein jour, juste en face de la mairie du Cannet. Il s’agissait d’une dame aux cheveux blancs qui venait de retirer de l’argent à la poste et qui tomba à terre. Une voisine, directrice d’une auto-école, a dans l’exercice de son métier, assisté à pas moins de trois vols à la portière en quelques semaines. Une relation nous raconta qu’à la fin de l’été, à Nice, arrêtée à un feu de circulation, fenêtres fermées et verrouillées, des voyous avaient fait exploser une vitre pour lui dérober son sac posé sur la banquette arrière…

Qui n’a pas vécu lui-même ce genre d’aventure connaît un proche qui l’a vécu ! Et l’information circule, de bouche à oreille. Si l’on n’est pas arriver à la paranoïa des habitants des grandes métropoles américaines, on s’en rapproche. Le temps passe mais nous gardons toujours deux décennies de retard sur nos cousins d'outre-atlantique, ce qui n'a rien de rassurant quant à l'avenir. Il ne reste qu'à nous habituer… Nos villes ressemblent de plus en plus aux leurs, les ghettos s’y développent, zones désignées de non-droit, notre système d’éducation prend la même direction, tiré par un moteur à deux temps… le privé pour les nantis et les ambitieux, le public pour les autres…

Mais qui cherche les causes profondes et tente d’y remédier ? Fernand Dartigues, fondateur de notre magazine, alors simple inspecteur de police ( 1944 ) puis plus tard directeur pour la France de la Revue Internationale de Criminologie, fondée en Suisse par Carlo Moretti, affirmait qu’elles n’étaient pas si difficiles à trouver. Homme de terrain, il affirmait qu'il fallait avant tout du bon sens et du courage ! Du courage, il en faut pour dresser le bilan et porter un regard objectif sur nos erreurs. L'audit réalisé, en tirer les conséquences et imaginer des solutions, les défendre sur la place publique avant de pouvoir les appliquer. Tout un programme !

Où en sont nos élus, que proposent-ils à la veille des échéances importantes de l'année prochaine ? C'est à eux qu'il appartient en priorité de trouver des solutions aux problèmes de la vie quotidienne mais aussi à résoudre les grands problèmes de société. Ils ont fort à faire entre ceux liés à la qualité de notre environnement et les impératifs du développement durable.

- mention : www.pariscotedazur.fr - avril 2006 – Alain Dartigues-
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