La mémoire des rapatriés défendue

par les députés des Alpes Maritimes.

Lors de la séance du 29 novembre dernier, les élus de la Côte d'Azur furent particulièrement pugnaces à défendre la mémoire des rapatriés d'Algérie et des harkis. Il est vrai que de nombreux membres de ces communautés habitent le département. Que leurs enfants et maintenant petits enfants, ont été élevés dans la mémoire des événements tragiques, causes de leur exil. On comprend que le sujet soit délicat et que beaucoup d'émotion l'entoure. La droite et la gauche trouvèrent sur ce sujet un prétexte idéal à s'affronter.

La député Michèle Tabarot s'exprima longuement, avec passion et avec la plus grande fermeté sur cette proposition de loi visant à abroger celle portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés. Elle sait de quoi elle parle, toute sa famille vient de la région oranaise et son père fut un des fondateurs des Maisons de Pieds Noirs. Elle défendit avec fierté la loi de juin 2004. Une reconnaissance qui arrivait après des années de souffrance et d'humiliation, "des années difficiles où (les rapatriés) ont dû faire face aux pires accusations, eux qui n'avaient pour ambition que de vivre sereinement, entourés des leurs, sur ce sol d'Algérie qu'ils aimaient par-dessus tout." Elle attaqua avec véhémence les partisans de son abrogation, dénonçant l'opposition parlementaire, la taxant de vouloir satisfaire une partie de son électorat, soulevant un tôlée de protestations dans les rangs de la gauche. Précisant sa critique, elle accusa une "minorité d'enseignants", ceux-là même "qui arrivaient avec des roses à la main dans l'enceinte de nos salles de classe le 11 mai 1981", date de l'arrivé au pouvoir de François Mitterrand. Ceux-là mêmes qui enseignaient "que les modèles communistes, de Moscou, Pékin ou Phnom Penh, permettaient à l'être humain de s'épanouir dans une société juste, égalitaire, et dans le respect des droits de l'homme".

Son intervention fut saluée dans l'hémicycle par les membres de l'UMP. Elle fut soutenue dans cette joute oratoire par Jean Leonetti, le député d'Antibes, Jean-Claude Guibal, député de Menton et par Lionnel Luca, le fringant député de Cagnes-sur-mer qui s'attacha à mettre en évidence le parti pris de l'histoire de France telle que distillée dans les ouvrages scolaires.

De l'autre côté, Mme Christiane Taubira développa, la théorie d'une France coupable de son passé colonialiste, à ses yeux à jamais coupable. Un concept très judéo-chrétien … Mais les arguments évoqués lors de cette escarmouche parlementaire n'ont pas apparemment convaincu le chef de l'Etat et, plutôt que d'arbitrer en faveur de l'un ou de l'autre camp, il a botté en touche. Sans vraiment désavouer ses partisans – quoique certains sont en droit de penser le contraire – il s'en est remis à la sagesse du Conseil constitutionnel qui en décembre avait émis le vœux de faire l'impasse sur "le rôle positif de la France dans ses colonies".

Chacun, malheureusement restera sur sa faim, persuadé d'avoir raison. Les uns prisonniers de leur sentiment de culpabilité, les autres dans leur légitime désir d'être reconnus et absous d'un pêché qu'ils n'ont pas commis !