Technologies : Entre inquiétude et fascination...

Catégorie Les paradoxales

À l'heure où se multiplient les controverses sur les risques liés au déploiement de certaines technologies (5G, compteurs Linky, reconnaissance faciale, intelligence artificielle...), quel est l'état de la relation de la société au progrès technologique et notamment la capacité des institutions et des experts à l'informer sur ce sujet. L'Académie des technologies a cherché à mesurer le degré d'intérêt des Français pour les découvertes scientifiques et technologiques mais aussi les préoccupations qu'elles peuvent susciter, notamment sur le plan sanitaire et environnemental.




L’étude Ifop commandée par l'Académie des technologies a révélé une inquiétude croissante des Français vis-à-vis de la... technologie.

 Les technologies constituent une source d'anxiété de plus en plus grande au point que les Français sont désormais une majorité à se dire inquiets à ce sujet : 56%, soit un niveau en très forte hausse par rapport à ce que l'Académie des technologies avait pu observer ces dernières années.

Cette inquiétude grandissante à l'égard du progrès technique ressort aussi dans le déclin de la croyance dans les bienfaits des avancées scientifiques dans divers aspects de la vie quotidienne. En effet, par rapport à ce qui avait été mesuré il y a une dizaine d'années, les Français sont nettement moins nombreux à reconnaître leur impact positif sur la santé (45%), les loisirs numériques (35%), l'alimentation (25%) ou l'environnement (21%).

 Et dans un contexte marqué notamment par les débats sur le changement climatique et les risques liés aux émissions électromagnétiques, leurs impacts sur le plan sanitaire et environnemental sont parmi ceux qui cristallisent le plus d'inquiétudes. Ainsi, près d'un Français sur deux estiment que leur impact sur la faune et la flore est négatif contre 21% qui pensent qu'il est positif.

 Ces préoccupations croissantes à propos des risques liés aux technologies n'empêchent pas une attirance de plus en plus marquée des Français pour « les produits comportant une innovation technologique », attrait qui a cru de manière très conséquente ces dernières années (+16 points depuis 2003) au point d'être désormais majoritaire (55%) dans la population.

 Cet attrait va sans doute de pair avec un goût prononcé pour les nouvelles technologies de l'information et de la communication si l'on en juge par exemple par le nombre croissant de Français partageant l'idée selon laquelle « Internet améliorera la qualité de la vie » (59%).

 De manière plus générale, les technologies suscitent toujours un intérêt très large (75%) chez les Français, notamment chez les cadres (81%) et les dirigeants d'entreprise (82%).

 L'importance de la R&D dans le niveau de compétitivité de l'économie française est toujours reconnue par une majorité de Français (61%), notamment par les partisans de la 5G qui sont 71% (contre 46% de ses opposants) à estimer que « ce n'est qu'en utilisant les technologies les plus avancées que notre économie peut devenir plus compétitive ».

 Or, force est de constater que la France comme le reste de l'Europe est loin d'apparaître en pointe en matière de recherche scientifique et technologique : seuls 21 % des Français citent un grand pays européen (France, Allemagne, Royaume-Uni) parmi les pays les plus en avance dans ce domaine, contre un tiers qui citent les USA et près d'un sur deux qui évoquent un pays d'Asie (Japon, Corée du Sud, Chine).

 Et sur ce point, il est intéressant de relever que l'avance technologique asiatique est particulièrement ressentie dans les catégories populaires (51% chez les ouvriers contre 34% chez les cadres) alors que les cadres, eux, perçoivent surtout l'avancée de pays occidentaux comme les États-Unis (39%) ou Israël (9%), comme si la perception du « danger » technologique des pays étrangers était liée au type d'emplois menacés (« manuels » en Asie, « intellectuels » aux USA).

 Le sentiment d'être bien informé sur les questions de science et de technologie est toujours aussi faible (33%) qu'il y a une vingtaine d'années : une large majorité de Français se sentant mal informés sur le sujet (58%), en particulier parmi les seniors (63 % chez les seniors de plus de 65 ans) et les moins diplômés de la population.

 Or, la population exprime clairement une volonté de combler ce manque d'information si l'on en juge par la forte proportion de Français souhaitant « être plus impliqués dans les décisions portant sur des technologies controversées » (77%) ou, estimant que le gouvernement n'informe pas suffisamment des conséquences de la technologie (75%).

 Et sur ce point, les résultats mettent en lumière un nombre limité d'acteurs suffisamment crédibles pour combler ces attentes : les seuls supports ou acteurs en qui une majorité de Français ont confiance sur ce sujet sont les revues scientifiques (73%), les chercheurs et les journalistes spécialisés sur les questions scientifiques et technologiques (66%). 

  • Étude Ifop pour l'Académie des technologies réalisée par questionnaire auto-administré en ligne du 15 au 16 octobre 2020 auprès d'un échantillon de 1 018 personnes, représentatif de la population âgée de 18 ans.