Politique : la problématique de la suppléance fait du bruit dans le Landerneau... cannois.

Dans la perspective des élections législatives, les États-majors ont des sueurs froides.

Beaucoup croyaient que la parité - un homme, une femme - qui s’était imposée pour les élections cantonales, s’appliquerait lors des législatives. Curieusement il n’en est rien. On peut s’étonner que nos législateurs puissent, pour les élections départementales, décréter que si le candidat est un homme, son suppléant sera obligatoirement une femme et vice versa, et ne pas appliquer cette même règle pour les élections à l’Assemblée nationale… On le voit dans cet exemple concret, la parité homme femme est loin d’être acquise en… politique du moins. Quant au machisme ordinaire, nos élites sont, dans leurs discours et parfois leur vie privée (qui ne nous regarde pas mais que l’actualité nous impose), loin d’être exemplaires.

  

Sur la circonscription de Cannes, ceux qui pensaient que l’annonce de la candidature… hâtive de Bernard Brochand, au renouvellement de son siège de député, sonnait la fin de partie pour David Lisnard, resteront donc sur leur faim. En effet, si la parité avait été validée pour ces élections, celui-ci aurait été mis hors jeu. Ce n’est pas le cas. Il apparaît maintenant comme plus que probable que le nom de David Lisnard sera bien inscrit sur le bulletin de vote. Certains en viennent à croire que la présumée brouille entre le premier adjoint et le maire, n’était qu’une façade propre à tromper l’ennemi. Michel Emeriau, rédacteur en chef du site satirique « Le Cannois déchaîné », imagine un scénario plus machiavélique, un scénario mitterrandesque. S’appuyant sur les propos du maire rapportés par le magazine l’Expansion qui affirme qu’il restera « maire jusqu’à la dernière minute pour (s)’assurer que tout ce (qu’il a) fait ne soit pas détruit », il imagine que celui-ci n’est plus persuadé que son successeur (celui qu’il mis dans le starting-block), travaillerait dans la stricte continuité de la vision qu’il a pour la ville, s’il en prenait la direction.

La perspective quasi acquise du ticket Brochand/Lisnard aux législatives a aussi fait réagir les responsables de l’UMP sur la circonscription concernée, la 8ème des Alpes-Maritimes. Son délégué élu (contre la candidate adoubée par le maire de Cannes), David Konopnicki, a assuré le député sortant qu’il donnerait des consignes de vote claires en faveur du candidat désigné par les instances du parti mais… Mais, en même temps, il lui demande instamment de choisir son suppléant ou suppléante (puisqu’on sait maintenant que la parité n’est pas une obligation), dans un autre secteur de la circonscription, entendons par là : Mandelieu La Napoule, Théoule-sur-mer ou Vallauris. Cela laisse bien sûr supposer que s’il ne répond pas à cette invite, le délégué pourrait choisir de donner d’autres consignes…

Les observateurs de la vie politique locale ne sont pas dupes. Se profile derrière ces arguties, une autre échéance, celle des municipales. Un Bernard Brochand réélu député avec un bon score, accompagné par un David Lisnard comme suppléant, pourrait se poser la question d’un troisième mandat à la tête de la mairie, où il partirait avec un avantage. À moins que, sagesse aidant, il ne laisse un plus jeune se jeter dans l’aventure… Dans le cas d’un échec, ses chances de se voir reconduire à la mairie seraient fortement diminuées, de même pour son poulain.

  

Se pose la question : quel adversaire est le mieux placé pour mettre en péril Bernard Brochand aux législatives ? Philippe Tabarot ? Le conseiller municipal et conseiller départemental de Cannes Centre, très présent sur la place et au conseil municipal dans le rôle ingrat d’opposant, attendra sans doute les résultats de la présidentielle pour se positionner. Qu’a-t-il à gagner ? Une victoire serait une voie royale vers la mairie certes mais une défaite l'handicaperait.

Quid d’Henry Leroy ? Le maire de Mandelieu et conseiller général, déjà défait aux dernières législatives n’a rien à gagner surtout depuis que la circonscription a été remodelée. Vallauris (mais, mystère des savants redécoupages, pas Golfe Juan qui reste sur la circonscription d’Antibes), a été ajoutée et son maire, Alain Gumiel, élu président du Comité Régional du Tourisme grâce à l’appui d’Éric Ciotti et de Christian Estrosi, a manifestement rejoint le camp Brochand/Lisnard et leur apportera son soutien, au grand dam des Tabarot Michèle et Philippe qui avaient, en d’autres occasions, aidé le maire de Vallauris. Henry Leroy donc, en se représentant, même si, faute à la configuration de la circonscription, aurait peu de chances d’être élu, empêcherait Bernard Brochand de gagner avec trop de marge préservant ainsi les chances de Philippe Tabarot pour les échéances à venir. Alors simple manœuvre de diversion, stratégie concertée ?

Le rôle du FN n’est pas non plus à négliger. Surfant sur la vague Marine Le Pen (sera-t-elle au second tour ?), le candidat du Front n’aura pas besoin d’être connu pour thésauriser au premier tour. Mais où iront ses voix au second ?

Rien n’est gagné d’avance, chacun s’observe et, répétons-le, les scores à la présidentielle et la personnalité du nouveau président ou présidente, remettront les pendules à l’heure… et affineront les stratégies.

Alain Dartigues